VISITE PATRIARCALE EN SYRIE
(6-12 avril 2017)
CONSTATATION DOULEUREUSE, ESPERANCE !
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VISITE à HOMS, (Syrie Centrale)
du 6-8 avril 2017
Parti du Liban, le jeudi 6 avril, le patriarche de l’Eglise Syriaque Catholique d’Antioche, Ignace Youssef III Younan, débuta sa visite de Homs, à Marmarita, dans « La Vallée des Chrétiens », où il rencontra des familles déplacées et célébra la Divine Liturgie de la Messe en préparation de la Semaine Sainte.
Le lendemain vendredi le 7 avril, il se dirigea vers « Hafar », un village syriaque à 65 km sud-est de Homs, où il célébra une messe de « requiem » pour feu chorévêque Ignatios Maidaa. Pour y arriver, le patriarche accompagné de Mgr. Philippe Barakat, archevêque de Homs, Hama et Nabk et d’autres membres de clergé, devait traverser Al-Shuayrat, localité bombardée à l’aube, par des missiles Américains. Dans son homélie, le patriarche remercia le Seigneur d’avoir préservé Sadad et Hafar, deux villages syriaques menacés et envahis à plusieurs reprises par les terroristes de DAECH. Il félicita l’assemblée des fidèles, d’avoir répondu à l’appel du Seigneur pour l’accompagner dans sa passion et défendre avec courage, leurs villages, ses habitants innocents et terre ancestrale. Dans l’après-midi, le patriarche fit retour à Zaydal, un autre grand village syriaque, où il a présidé au « Chemin de Croix », dans la grande église pleine de fidèles.
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VISITE à ALEP
du 8-12 avril.
Ce fut un long chemin de 5 heures de voiture traversant des villages en ruines dans les 3 provinces de Homs, Hama et Alep. C’est surtout en se rapprochant de cette dernière ville, connue avant la guerre, pour être la deuxième plus florissante et dynamique ville de la Syrie, qu’on a pu remarquer les conséquences extrêmement néfastes d’une guerre qui a trop duré dans le pays. La route d’arrivée contournait la ville du côté est, l’aéroport toujours clos et les quartiers industriels horriblement dévastés.
Vraiment, pas de mot qui puisse décrire le niveau de destruction qui a frappé Alep. Tout au long de la visite de 4 jours dans cette ville martyre, subissant un siège de cinq ans, avec la pénurie d’eau, d’électricité et de fuel, on ne pouvait pas cacher un sentiment de profonde douleur avoisinant au désespoir.
Il faut bien reconnaitre que sous prétexte d'introduire la démocratie dans une région, où l'amalgame de l'état et de la religion est une sorte de dogme, les pays occidentaux ont persisté à fomenter un conflit sectaire, sanglant et destructeur en Syrie. Ce pays était destiné à établir un des meilleurs systèmes de gouvernement civil, fut une proie facile des bandes terroristes. Les chrétiens, tués, kidnappés ou déracinés en furent parmi les premières victimes. Suite à ces atrocités, Alep devait perdre presque la moitié de sa communauté chrétienne!
Dans toutes les visites faites jusqu'en mai 2012, on admirait Alep, en tant qu’une ville florissante, cosmopolite et paisible. Ses habitants, musulmans et chrétiens formaient une belle mosaïque connue pour sa tolérance, sa convivialité, et son dynamisme. Ceux qui ont cherché à détruire cet élan prometteur, pour quelque raison que ce soit, sont des vrais criminels! Le patriarche devait surtout remarquer la frustration profonde dans les esprits des personnes rencontrées, surtout parmi les jeunes. Vivant dans la section du gouvernement légitime, ils se demandaient pour quelle raison ils étaient oubliés par les gouvernements Occidentaux! En effet, ils se considéraient être trahis par la communauté des nations manipulée, elle, par les matraquages médiatiques, lesquelles comparaient Alep-Est à Stalingrad..! La vérité consistait à ce que le gouvernement puisse libérer une partie de la ville, prise en otage par des milices armées se qualifiant faussement d’être une opposition populaire modérée. Cependant, après sa libération, la ville d’Alep réunifiée, a vite repris son cours normal, et les rues devinrent pleines de vie.
On sentait déjà un grand soulagement dans les esprits, suite à la libération de la partie Est et l’unification de toute la ville. L’espérance, seule refuge des chrétiens accoutumés à endurer toute sorte de persécutions pour l’évangile, était le leitmotiv de toutes les visites et rencontres du patriarche.
Sa Béatitude a tenu à rencontrer les chefs de toutes les Eglises: catholiques, orthodoxes et protestante ainsi que les instances musulmanes. Il rendit des visites dans la vieille ville où les six anciennes cathédrales avec leurs institutions sociales et éducatives étaient ou bien saccagées et démembrées ou bien complètement à terre! Des larmes étaient à peine contenues! Ce même jour, le patriarche fut reçu par une demi-douzaine de cheikhs et d'architectes qui ont montré l'extension des dommages infligés à l’ancienne mosquée des Omeyyades. Du haut de la fameuse citadelle d’Alep, on pouvait avoir une vue triste de la vieille ville toute en ruine!
Le Dimanche des Rameaux fut célébré dans la grande cathédrale syriaque catholique en un climat insolite et très émouvant. Au cours de la Sainte Messe, la pluie commença à tomber. A cause des fenêtres brisées et des trous dans le haut plafond causés par des obus, l’assemblée qui remplissait la cathédrale devait participer sous les parapluies !
Ce soir-là, le « Rite des Lampes », une dévotion propre à l’Eglise Syriaque, rappelant la parabole des dix vierges de l’évangile de Jean, a été célébré à l’église de saint Ephrem, dans le quartier syriaque. S’adressant à l’assemblée, le patriarche leur a rappelé leur vocation unique de porter témoignage à Jésus crucifié dans un milieu dont la majorité continue de l’ignorer. Il a tenu aussi une rencontre avec des centaines de jeunes qui lui ont posé des questions et entendu ses réponses et directives au sujet de leur avenir dans un pays menacé de tant de dangers.
Mais le moment le plus émouvant a été lorsque le patriarche a rencontré des familles en deuil pour leurs proches tués durant le siège. Chaque personne se sentait soulagée à exprimer la souffrance ressentie durant de longs mois, à cause de la perte d'un enfant qui jouait avec ses camarades, d’un mari qui sortait pour chercher de quoi nourrir les siens, d’une mère ou d’un père, d’une sœur ou d’un frère. Devant l’absurdité de ces tueries, seule la foi en le Rédempteur pourrait apporter la consolation et seul le mystère de La passion et résurrection qu’on devait commémorer en cette Semaine Sainte, répondrait aux nombreuses questions des affligés, pour les fortifier et raviver leur espérance.
Récapitulant les moments forts de sa visite, le patriarche était convaincu:
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qu'il n'y aura jamais de paix réelle en Syrie, à moins que les syriens s’engagent en un dialogue franc et honnête, comme c’est le cas à Alep et sans interférence de pays opportunistes. La contribution d'un pays ami, comme la Russie, est plus que jamais nécessaire.
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Qu’il est essentiel d'arrêter d'abord le conflit sanglant, empêchant toute canalisation d'argent et de combattants sans l’accord de la Syrie, un pays toujours souverain et reconnu.
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Que la réconciliation entre tous les segments de la population syrienne devra être le but de toute intervention de l’extérieure.
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Enfin que la survie des chrétiens et des autres minorités dépend de la sincérité de la famille des nations à arrêter l’hémorragie en cours, à cause d’une guerre si absurde. C’est leur donner l’espoir que la Syrie pourra et devra renaitre.
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